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DALF C1 : portrait d'apprenant

    Deuxième portrait de personnes inspirantes. Aujourd’hui, Maté Abraham nous parle d'études universitaires, de DALF C1 et de bonnes habitudes d’apprenant.

J’aime le français pour sa capacité à exprimer les nuances de mes propos.

Bonjour Maté, merci d’avoir accepté de témoigner. Peux-tu te présenter en quelques mots, et nous expliquer ton parcours avec le français ?

Je m’appelle Maté Abraham, je travaille à la mairie d’Ujbuda (à Budapest), pour l’un des maires adjoints. J’ai terminé mes études en histoire et en français l’année dernière en Angleterre, mais j’ai passé un an en France, à Paris. Chaque année à l’université, j’avais des cours de langue française obligatoires, et des cours optionnels comme culture ou histoire etc.. à Paris, j’ai suivi beaucoup de cours de relations internationales et d’études politiques. J’ai toujours suivi mes cours en français pendant mon séjour en France. Avant la fac, j’ai commencé le français au lycée, à 17 ans. Mais comme à la fin du lycée, je n’étais pas satisfait de mon niveau de français, j’ai décidé d’en continuer l’étude à l’université, pour maîtriser la langue beaucoup mieux.

Maté, Paris 2018

Mais pourquoi le français ?

A la base, j’avais choisi le français parce que c’est la langue de la diplomatie, c’est souvent la langue en laquelle les documents originaux sont rédigés, par exemple pour le comité olympique, quand il y a une ambiguïté dans la version anglaise, c’est le français qui la résout, mais c’est seulement un petit exemple. En général, la diplomatie, c’est ce qui a motivé mon choix de deuxième langue étrangère, après l’anglais.


Qu’est-ce qui t’a poussé à présenter le DALF C1 ?

Je voulais un document très sérieux et officiel pour attester de ma connaissance de la langue. Je voulais une preuve objective et irrévocable que je parle français, que ce ne sont pas seulement des études, parce qu’à mon avis, c’est une chose de suivre des cours de français à l’université et de bien connaître la culture française, c’en est une autre de maîtriser vraiment la langue. Je voulais aussi me prouver à moi-même que je peux le faire ! Parce qu’à la fin du lycée, j’ai tenté le DELF B2, et je l’ai raté magistralement. Je ne comprenais rien, c’était horrible ! Je ne voulais pas rester sur cet échec, c’est aussi ce qui m’a motivé, comme une sorte de revanche : obtenir un succès pour exorciser un échec !


Tu dirais que le français est une langue difficile ?

En général, maîtriser le français est plus difficile que l’anglais. C’est une langue plus précise, peut-être aussi plus sophistiquée selon les structures que tu utilises. Et puis il y a la question des registres de langue, qui permettent d’évoluer dans un spectre très large, et de nuancer son propos en fonction des personnes avec qui on parle.

Un autre petit détail, je crois qu’il est plus difficile d’apprendre le français parce qu’on vit dans un monde où tout est en anglais : les séries, les jeux vidéos, les chansons. Même si tu n’étudies pas l’anglais, tu y es exposé, la langue t’influence, et ça n’est pas le cas avec le français, ça le rend un peu moins accessible, et donc plus “étranger”.


Qu’est-ce qui t’a semblé particulièrement difficile dans l’examen ?

Le plus difficile pour moi a été la production orale. C’était très difficile, parce qu’à l’université, tous les examens étaient à l’écrit. En plus, et à Paris, tout le monde me parlait anglais. J’essayais de répondre en français, mais on me répondait en anglais, et ça m’énervait énormément, moi je voulais pratiquer le français !

Je comprends très bien quand je lis et j’écris sans problème, je ne dirais pas sans erreur, mais presque. Mais parler français, ça n’est pas automatique, je réfléchis, je fais des petites fautes. Et puis, j’ai remarqué que dans la vie courante, il y a beaucoup d’anglicismes, on peut même se débrouiller sans problème en formulant des phrases en franglais dans la vie de tous les jours,  mais à l’examen, c’est plus délicat !

Pendant l’examen, ce qu’il faut, c’est parler couramment, sans s’arrêter, et ça, pour moi, c’est dur. Je n’ai pas encore cette totale fluidité. Du coup, j’ai eu entre 21 et 23  sur 25 dans les compétences de compréhensions écrite et orale, et de production écrite. Mais pour la production orale, ma note tournait autour de 10, c’est pas si glorieux… sans non plus être une honte absolue.


Comment as-tu préparé le DALF C1 ?

D’abord, j’ai toujours choisi des cours en français à l’université. J’ai aussi suivi un cours de préparation au DALF à l’Institut français dans mon pays, très axé sur la méthodologie et la nature des épreuves. C’était utile mais je crois que j’avais de très bonnes bases, de par mes études universitaires, où on écrit beaucoup de dissertations, on assiste à des cours magistraux, on participe à des travaux dirigés etc...



Tu aurais des conseils pour de futurs candidats ?

Passer le plus de temps possible dans un pays francophone. Lire le plus possible aussi, parce que c’est sans doute la compétence qu’on peut améliorer le plus facilement sans trop d’efforts. Pour la compréhension orale, j’écoute souvent des podcasts, c’est très utile. Par exemple quand je conduis ou quand je vais à la salle de sport, j’écoute des podcast français, sur des thèmes qui m’intéressent, comme la politique, par exemple Cultures Monde sur France Culture. Ce sont des conversations avec des experts, des personnes très intelligentes dans leurs domaines, qui parlent dans un registre intéressant à s’approprier.


Quand tu étais au lycée, tu as participé à deux projets ROC . Avec le recul, est-ce que ces expériences ont influencé ton rapport à la langue française ? Quel souvenir en gardes-tu ?

J’adorais le fait qu’on pouvait parler français sans pression. Et puis, le fait de raconter une histoire rend la production orale moins artificielle. Je me sentais beaucoup plus à l’aise en racontant une histoire qu’avec des activités de productions “normales”, de cours classiques. C’est un peu difficile à expliquer.. En fait, même si les histoires que nous créions étaient loin d’être des situations quotidiennes, et même si on racontait des choses pas trop réalistes, paradoxalement, c’était beaucoup plus facile. L’imaginaire, la fiction, c’était plus simple que les situations habituelles des cours. D’ailleurs, maintenant que tu m’en parles, je serais curieux de relire ce qu’on a écrit. ça va peut-être raviver les souvenirs du travail de groupe, de l’ambiance des cours.


Et aujourd’hui, quelle place a le français dans ta vie ?

Je continue à lire la presse en français, comme Le Monde, pour ne pas perdre mes compétences acquises. C’est peut-être un peu artificiel, parce que je m’efforce de le faire, ce n’est pas spontané, pas “naturel” comme quand j’étais à Paris, où c’était logique d’être confronté aux médias en français. Depuis que je suis rentré dans mon pays, c’est moins évident, c’est presque un peu “snob” en quelque sorte.

J’ai aussi des collègues francophones dans le projet européen sur lequel je travaille. Tout le monde parle anglais, mais quand ils parlent entre eux, je les comprends. Peut-être je devrais leur parler français, mais bon, il est établi que la langue d’échange est l’anglais, alors…


Un dernier mot ?

Je ne l’ai pas dit, mais en fait j’adore le français ! Beaucoup plus que l’anglais, justement, pour sa capacité à exprimer les nuances de mes propos. C’est une chose que je sens moins en anglais.


entretien réalisé le 17 juin 2020






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